Suicides de fonctionnaires: l’étrange désinvolture de l’État employeur

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Suicides de fonctionnaires: l’étrange désinvolture de l’État employeur

Plusieurs affaires récentes illustrent la question sensible des suicides de fonctionnaires et l’étrange désinvolture avec laquelle l’État employeur réagit à ce phénomène inquiétant. Alors que les employeurs privés sont extrêmement encadrés et menacés par les règlements, les pouvoirs publics, qui édictent pourtant les lourdes contraintes du code du travail, semblent pour leur part assez peu concernés par la santé des salariés au travail. Voici un petit guide de ce qu’il ne faut pas faire.

Les suicides de fonctionnaires sont étrangement pris en compte par l’État employeur. L’affaire est racontée par Le Midi Libre: la directrice des ressources humaines du rectorat de Montpellier a été mutée cet été. Au mois de février 2019, elle avait eu l’étrange idée d’ironiser devant des enseignants dont les options étaient supprimées, en leur suggérant, en guise de reconversion , « l’euthanasie ». Dans le lycée de Béziers où ils enseignaient, six suicides étaient intervenus depuis une dizaine d’années…

Le sarcasme fait souvent mauvais ménage avec le management. Mais c’est particulièrement lorsqu’il vire à l’humour noir face à des situations tragiques qui concernent les collaborateurs de l’entreprise.

Face aux suicides de fonctionnaires, l’indifférence de l’État?

De fait, lorsqu’un directeur des ressources humaines ironise publiquement sur le suicide des salariés dans le cadre professionnel, on est estomaqué. Les affaires du technocentre de Renault, et surtout de France Telecom, ont constitué des avertissements suffisamment importants pour que, dans le secteur privé, peu de responsables osent s’essayer à l’exercice.

Au demeurant, les représentants du personnel n’auraient aucune peine à obtenir des sanctions contre ce type de propos. La réglementation en matière de risques psycho-sociaux est si rigoureuse que l’incrimination pénale ne serait pas loin. Et la menace est vraiment dissuasive.

On s’étonnera de voir que, dans le service public, les mêmes précautions ne semblent pas exister. Des responsables peuvent conserver leurs fonctions plusieurs mois après avoir commis des propos qui sont pour le moins choquants. Mais il est vrai que les relations sociales dans l’administration sont exonérées du Code du Travail. Somme toute, le statut de la fonction publique qui s’applique en lieu et place du Code impose moins de sujétions à l’État employeur.

Suicides dans la police: une inertie coupable?

On relèvera que, dans la police, les suicides, dont l’origine professionnelle est mise en avant par les auteurs eux-mêmes de ces actes tragiques, sont extrêmement nombreux. Pour mémoire, dans l’affaire France Télécom on déplore 39 suicides en 2 ans, pour environ 110.000 salariés. Dans la police nationale, qui compte sensiblement le même nombre de salariés, on en déplore annuellement le double

Pour la seule année 2019 (c’est-à-dire sur les 7 premiers mois de l’année), les syndicats soutiennent que 9 gendarmes et 43 policiers se seraient suicidés. Soit plus que ce qui fut reproché au patron de France Telecom sur deux ans…

Malgré ces chiffres alarmants, aucun plan d’ampleur, à la hauteur de la situation, ne semble mis en place pour endiguer le phénomène.

Management public, management privé, deux poids, deux mesures

On n’ose pas imaginer quelle serait la réaction de l’opinion publique si une entreprise privée se permettait de ne pas réagir à une vague de suicides aussi importante parmi ses salariés. La justice ne manquerait pas d’ouvrir une enquête et l’incrimination pénale suivrait.

Pourquoi les employeurs publics peuvent-ils échapper à des sanctions ou des réactions du même ordre? L’État est-il au-dessus des lois ou du bien-être de ses salariés? La différence de traitement étonne.

Il serait d’ailleurs intéressant de voir si l’inertie de l’État employeur face aux suicides qui déciment ses rangs pourraient faire l’objet d’une incrimination devant la Cour de Justice de la République.

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